Paysages de frontière Itinéraire réalisé avec le site internet www.itineraires-caue.fr

Les deux bâtiments qui enserrent la place du Mont d'Or furent jadis des bâtiments des douanes qui contrôlaient la route nationale en direction de la Suisse.
L'actuel bureau de poste abritait le bureau des douanes et les logements de fonction. Il a été cédé à la commune lorsque les douanes se sont installées plus en aval, au hameau de la Ferrière en 1899. Cependant, le bâtiment que vous observez aujourd'hui n'a pas toujours été ainsi. A l'origine bien plus imposant, il abritait des canons pointés vers la route royale sur le soubassement fortifié en dessous.
La salle des fêtes, quant à elle, abritait l'entrepôt des douanes. Ce dernier n'a trouvé sa fonction actuelle de salle des fêtes qu'en 1912 sous l'action de l'entrepreneur Léon Jeannin. L'entrepôt est un des rares bâtiments de Jougne qui ait résisté à l'incendie de 1870 ce qui permit à la commune d'y abriter ses sinistrés pendant la longue période de reconstruction.

Dès le 5e siècle avec le développement du christianisme, Jougne sert de point de passage à travers le Jura.
Les moines empruntaient la vallée de la Jougnera, sur les traces de l'ancienne voie romaine, afin de rallier l'abbaye de Saint-Maurice à Agaune en Suisse depuis leurs monastères en Bourgogne. La chapelle qui se dresse aujourd'hui en contrebas de Jougne faisait partie d'un prieuré qui servait d'étape durant le pèlerinage. Elle fut bâtie au 12e siècle sur la base d'une crypte carolingienne toujours présente et datée du 9e siècle.

Avec l'annexion de la Franche-Comté par la France au 17e siècle, il devient nécessaire pour les douanes de contrôler les chemins qui traversent la nouvelle frontière avec la Suisse.
En effet, les sentiers sont support d'un trafic et d'une contrebande qui tente d'outrepasser les nouveaux contrôles sur des échanges qui, jusqu'alors, se faisaient librement. Des postes de douanes sont mis en place le long de la frontière, souvent basés dans les villes et villages situés sur les points de passage comme Jougne. Puis des petites cabanes sont construites par les douaniers avec les matériaux et les moyens du bord afin de se protéger des éléments en basse saison et durant les tours de nuit.
La Bannerette, comme la plupart de ces cabanons, est un petit carré de bois et de tôle avec des fenêtres donnant sur le chemin qui évitait la route royale en direction de Vallorbe.

La frontière avec la Suisse revêtait dans le plan du ministre des armées Maginot un enjeu stratégique dans le cas d'une attaque germano-italienne.
Cependant, l'enjeu étant moindre qu'en Belgique ou que le long du Rhin, deux frontières qui mettaient en danger les bassins industriels du nord de la France et exposaient le bassin industriel de la Ruhr, peu d'efforts ont été mis dans les défenses avec la Suisse.
Ainsi, le barrage de Vallorbe traverse toute la vallée d'un flanc à l'autre et quelques édifices camouflés sont répartis tout le long. Le système ne consiste essentiellement qu'en un barrage de plots en béton qui permettent le passage dans un sens mais l'empêchent dans l'autre.

L'importance de la vallée résonne jusque dans les temps antiques comme en témoignent les vestiges de cette voie romaine.
La situation de la vallée fait du col de Jougne un point de passage à travers le Jura qui fut utilisé dès l'époque romaine pour relier Lausanne et Orbe à Pontarlier et Besançon alors appelées respectivement Ariolica et Vesontio.
Cette route servit par la suite, et ce jusqu'au 19e siècle, pour le transport du sel depuis les salines de Salins-les-Bains et d'Arc-et-Senans vers Berne et la Suisse romande.

A la fin du 19e siècle et dans la première moitié du 20e siècle, la vallée voit passer de nombreux trains transfrontaliers.
Il ne reste aujourd'hui que des vestiges de la voie ferrée comme cette pile de pont en ruine ou les tunnels qui traversaient le bourg que l'on peut voir en remontant l'ancienne voie en pente douce le long de la nationale jusqu'à la place du Mont d'Or à Jougne.
Si le tronçon suisse fut achevé dès 1867, la partie française ne sera inaugurée qu'en 1875 après 4 ans de travaux sur les cendres de Jougne.
Pendant son fonctionnement, Jougne, qui n'avait pourtant pas de gare, devint un lieu de villégiature en période estivale, comme en témoignent les nombreuses villas du faubourg qui tranchent avec les fermes originales.
Cependant, l'effondrement du deuxième tunnel sous le bourg pendant la seconde guerre mondiale et la percée sous le Mont d'Or depuis Vallorbe d'un nouveau tunnel ferroviaire plus rapide signe la fin de la ligne passant dans la vallée.

Pour mieux contrôler et protéger les frontières, il est décidé en 1793 d'ériger un fort à cet emplacement, dominant la vallée qui connecte la France et la Suisse.
Après un an de travaux, le fort est abandonné au stade d'ébauche à la fin de l'empire de Napoléon Bonaparte et ne servira jamais vraiment.